La transmission orale
facette indéniable de la Culture Créole

George de Lamare

Sirandanes
Sirandanes Sampek de l'île Rodrigues • Chantal Moreau • Collection Le solitaire Horasis Ltd., Fanfaron, Port-Louis, Maurice, tél. 240 1861, fax 240 5502
Il ne fait aucun doute que les contes, les proverbes, les sirandanes (et sanpek) ou jeu de mots devenus Zedmo ou zedmon ou z-mo sont encore des preuves que la culture créole est aussi orale et que la langue créole est son enfant légitime, une partie indissociable. La preuve flagrante est que toutes ces zistoires et z-mots qui se sont propagées à travers le monde Créole, et qui non seulement se ressemblent, mais sont pratiquement les mêmes. On entend le même proverbe, la même zistwar Konpere Lièvre racontée à Rodigues  et en Martinique, et pourtant il n’y a jamais eu de communication entre ces deux îles jusqu’aujourd’hui. On pourrait dire la même chose pour les Seychelles et la Guadeloupe ou pour la Guyane et l’île Maurice.

Dans le Grand Livre des proverbes créoles, Raphaël Confiant écrit en guise d’introduction «les proverbes ne sont pas des paroles du passe. Le proverbe n’a point de temps; il est eternel.» Il dira aussi que «le proverbe fige la langue dans un écrin de marbre, ou plus exactement de pierre, puisque sa marque première est la lapida rite.» plus loin il ajoute que «il saute aux yeux que le proverbe est l’un des lieux majeurs de la résistance culturelle.»

Tous les enfants des îiles Créoles qui sont nés avant, et tout juste âpres les guerres mondiales, connaissent tous ces proverbes, les contes et sirandanes car à l’époque ce fut la seule façon pour la classe ouvrière, de se «distraire» au claire de lune ou encore dans les veilles mortuaires, ‘passe la nuit’. Les mêmes règles et circonstances s’appliquent quand les enfants jouaient à la ronde, la marelle, à cache cache, zakanan-zakanan, gouli, roundese, kaskot, barre, etc… ce qu’on appelle aujourd’hui «cultural games».

En ce qui concerne les contes, au dire de ceux qui ont fait de recherches, les zistwars avec les compères zanimo, sont d’origines Africaines racontées par les descendants d’esclaves alors que ceux de Ti Jean et Jeanne ou autres «enn fwa dan enn pei, ti enan enn le roi…» sont de ces français pauvres qui s’assemblaient  avec les noirs, étant dans la même catégorie économique. C’est bien de cette façon que le métissage a pris place pour donner «les gens de couleur», contrairement a ce que disent certains que les métis sont forcement des enfants des blancs colons et des negresses.

Les sirandanes et Zedmo est un autre patrimoine qui prouve que la tradition orale peut survivre a travers des générations. Ils s’inscrivent  dans la même logique que les traditions vestimentaires, culinaires, artisanales et musicales des créoles.

D’après A. Diallo, (Seychellois) «Nous avons aussi note quelques ‘zedmo’ ayant l’allure de véritables énoncés de problèmes et dont la résolution exige beaucoup d’intelligence, d’esprit d’initiative et de création.».

Pour Philippe Lavalette (la Réunion) «les sirandanes sont les devinettes traditionnelles des îles créoles. Elles constituent  un véritable trésor linguistique et poétique qui témoignent de l’imagination propre a une culture».

C’est dans cette optique que j’ai le plaisir de présenter, pour commencer la série, a nos amis créoles quelques Sirandanes de l’ile Rodigues, extrait du livre Sirandanes Sampek de l'île Rodrigues de Mlle Chantale Moreau, en laissant le soin à nos lecteurs de trouver les réponses.

Plin li zour, a swar li vide? – Plein le jour, vide le soir?

Blan dan Nwar? – Le blanc dans le noir?

Blan pa kapav travay san nwar – Le blanc ne peut travailler sans le noir?

Boui li pa kui, gryer li li brile – Bouilli il ne cuit pas, grillé il brule?

Ce ki mo fin trouve, mem Bon Die pas fin trouve – Ce que j’ai trouvé, même le bon Dieu  ne l’a jamais trouvé?

     A suivre…